Opern

www.resmusica.com, 11. September 2011
Si la construction européenne semble au point mort, elle se porte pourtant culturellement très bien à Bruxelles. Dans le cadre de leur présidence tournante de l’UE, certains pays se servent de ce vecteur pour s’affirmer et pour présenter leur excellence artistique. C’est le cas de la Pologne, qui de juillet à décembre, met les petits plats dans les grands avec des expositions et de très nombreux concerts. En ouverture de ce « festival » polonais, La Monnaie, le festival des Flandres à Bruxelles et des institutions polonaises ont offert cette version semi-concertante du Roi Roger, l’opéra polonais le plus célèbre…

Initialement annoncée en concert, cette production aura été scénographiée par François de Carpentries qui se servait des décors (polonais aussi) de la reprise d’une production de Médée de Cherubini présentée en alternance. Ce travail est bienvenu, même si la présence du grand orchestre en fosse n’était pas sans poser parfois des problèmes d’équilibres avec les chanteurs (on se demande d’ailleurs pourquoi La Monnaie n’a pas présenté ce Roi Roger sur la vaste scène du Bozar dont l’acoustique aurait été plus précise).

Le chef d’orchestre Hartmut Haenchen, désormais invité régulier de l’orchestre belge, avait annoncé la couleur: il estime que cette partition prend place entre Strauss et Janacek. Dès lors, sa direction cultive une certaine puissance orchestrale un peu âpre et rugueuse. Ces qualificatifs sont développés avec un orchestre de La Monnaie attentif, mais dont l’absence de directeur musical commence à se faire cruellement ressentir. Certains pupitres (violons ou vents) semblent parfois aux limites de la justesse et de la précision. Quant à la vision du chef, même si cohérente et structurée, elle manque parfois de transparence et de luminosité et elle peine à mettre en avant tous les détails de cette orchestration extatique, foisonnante et débordante d’idées !

La distribution proposait des valeurs sûres et des habitués de cette partition. Ceux qui avaient assisté à la production parisienne en 2009, ultime spectacle de l’ère Mortier, retrouvait d’ailleurs le Berger d’Eric Cutler la Roxane d’Olga Pasichnyk. Ces deux chanteurs font très forte impression, par leur vécu des personnages et par leur musicalité. La soprano s’avère même exceptionnellement séduisante avec son timbre délicat au service de la sensualité de cette musique. Andrzej Dobber incarne un roi parfaitement désabusé mais vocalement solide. Le rôle semble être taillé sur mesure pour ce chanteur. Les comparses étaient quant à eux parfaits. Les forces chorales alternaient des chanteurs polonais et des jeunes belges. Si l’homogénéité des choristes polonais étaient exemplaires, le chœur des jeunes de la Monnaie peinait dans les aigus et manquait d’homogénéité.

Mais, cette production de cet exceptionnel chef d’œuvre marquera les esprits par ses qualités et surtout par la beauté hors norme de sa musique.