Aktuelles

25. September 2009

Bravo für Hartmut Haenchen mit dem Orchester der Opéra National de Paris in "Wozzeck"

Auch Hartmut Haenchens fünfte Produktion an der Opéra National de Paris wurde zum großen Publikumserfolg.

www.forumopera.com, 25.9.2009

Dans la fosse, Hartmut Haenchen dirige avec une énergie vrombissante la sulfureuse partition de Berg qui n'a rien perdu de sa singularité malgré le nombre de ses anneés et une constante conviction musicale, qui forcent le respect. Moins affirmée que le direction de Daniel Barenboim qui collait exactement à l'univers de Chéreau (Chatelet 1992 et 1998) celle-ci offre un contrepoint fort intéressant à la vision angoissée de Sylvain Cambreling (Bastille 2008).
Francois Lesueur

http://www.paris-update.com, 23.9.2009

At the beginning of last year, I wrote a review for Paris Update of a production of Alban Berg’s Wozzeck at the Opéra Bastille in which I deplored the staging but praised the musical quality. Now the production is back in the same house, but with a different musical team. It seemed like an interesting idea to see whether it had evolved in a positive way and whether it could be recommended to the opera-going readers of Paris Update.
Strangely enough, the production, set in a canteen at a sports complex, seems more palatable this time around, but that may be due to the fact that I came to it knowing what to expect rather than to any improvements in the staging.
As good as the individual performances were in the first production, the casting of French baritone Vincent Le Texier in the title role and the great Wagnerian soprano Waltraud Meier as Marie probably contributes most to the success of this restaging. Le Texier manages to dominate the overly cluttered stage more completely than the vocally brilliant but physically slight Simon Keenlyside in the last production. And Meier is incandescent, even with the occasional strain showing in the top notes of her vocally demanding part.
Fundamental problems with the staging still remain. The opera cannot work effectively in a modern setting, simply because the stigma attached to having a baby out of wedlock no longer exists in the contemporary urban world. At the beginning of the opera, the Captain informs us that Wozzeck is a good man but has no morals, solely because he has fathered Marie’s child. Moreover, the biblical language used by both Wozzeck and Marie has no effect when placed amongst children playing on bouncy castles (as is the case in this production).
Yet, Hartmut Haenchen’s superb musical direction of the orchestra and chorus of the Opéra National de Paris makes it worth catching one of the few performances of this run. The orchestral epilogue, coupled with Marie and Wozzeck’s son’s “Hopp, Hopp!” at the end of the opera, is as devastating as I have ever heard it performed.
Nick Hammond

http://www.resmusica.com; 22.9.2009

Ouverture palote à l’ONP, après une Mireille étrillée par les confrères, la reprise de la production Marthaler de Wozzeck – un héritage de la période Mortier – souffre d’une distribution déséquilibrée.

En effet, Vincent Le Texier est un Wozzeck honnête, bon acteur, qui a compris le rôle. Une prestation qui ne démérite pas, mais la voix ne suit pas toujours, l’émission est raide dans les aigus, la fatigue se fait sentir le long des actes. Il faut pouvoir succéder à Simon Keenlyside dans la même production... De même pour Waltraud Meier, actrice formidable, Marie tout à la fois vénale et repentante. Mais les aigus sont criards et la projection trop courte (l’orchestre la couvre plus d’une fois). Tout simplement Wozzeck et baryton, Marie soprano, et la distribution avait prévu un baryton-basse et une mezzo-soprano... Or c’est tout de même l’ouverture de la saison à Bastille qui se jouait ce soir-là !

Le reste n’appelle que des éloges : Kurt Rydl est un vieux routier du rôle du Docteur pervers, Andreas Conrad un Capitaine cynique à souhait aux aigus insolents, ravissant presque la vedette à l’excellent Stephan Margita en Tambour-Major. Signalons aussi Ursula Hesse von den Steinen, qui domine toujours autant le plateau dans le court rôle de Margret. Enfin parmi les seconds couteaux, retenons le Premier compagnon de Scott Wilde et le Fou de François Piolino. L’orchestre, véritable protagoniste, est chauffé à blanc par Hartmut Haenchen, livrant une lecture incisive à souhait, haletante, et toujours respectueuse de l’équilibre fosse / plateau.
La mise en scène de Christoph Marthaler reste toujours aussi efficace. Quelques menus changements sont opérés ça et là, soulignant un peu plus la névrose du personnage principal (schizophrène ? autiste ? homosexuel refoulé ?) dans cet unique décors de cantine de caserne. Une production majeure de l’Opéra National de Paris, qui, espérons le sincèrement, reviendra souvent dans les saisons à venir.
Maxime Kaprielian

L'Avant Scéne Opéra, 21.9.2009

Comme lors de sa Lady Macbeth de Mzensk en janvier dernier, Hartmut Haenchen tire de l'orchestre de l'Opéra des hurlements émotionnels à la limite du soutenable, et conduit toute la soirée au précipice du drama final. Alors que l'ouverture de saison de l'Opéra de Paris bat encore son plein, cette production clame haut et fort la puissance dévastatrice du théatre, révélateur du monde.
C.C

http://classic.forumactif.com; 20/09/2009

Le plus positif de cette serie de Wozzeck est AMHA le chef, Hartmut Haenchen (que j'aime bcp depuis son "Parsifal" et sa "Lady Macbeth of Mtsensk" a Bastille), et son orchestre qui n'est peut-etre pas super-rigoureux mais on est vite pris dans le vortex berghien, plutot de rester devant la fabuleuse vitrine musicale. BRAVI! En passant, je dois rajouter que cette oeuvre doit etre une des (la?) plus belles/reflechies/complexes oeuvres orchestrales dans le monde operatique! Chaque fois/ecoute en direct je decouvre au moins 2 lignes geniales de plus...

Concernant la mise en scene, mes reserves lors de la 1ere serie de cette production a l'ONP que j'ai eues sur le travail de Marthaler sont disparues. Peut-etre que c'est du au fait que cette fois ci Wozzeck ne souffre pas de ces tics idiots de s'essuyer les chaussures par son pantalon en permanence, ce qui m'a infiniment gene chez Keenlyside l'annee passee?! Avant l'homme etait presque predispose de devenir fou. Cette fois ci c'est plus complexe... De plus, cette fois ci j'accroche mieux a ce cote etouffant de la presence meme de tous les gens qui sont dans le fond, a l'exterieur de la tente, de ces enfants et tout ce monde envahissant qui detruit l'individu et qui devienent "mechants malgre eux". [ Ceux qui ont vecu les moments reelement difficiles dans la vie pouront tres bien comprendre cette demarche. ] TOUTEFOIS, il y a qqchose qui me derange dans cette mise en scene, qqchose que je n'arrive pas bien discerner, isoler... Ce n'est pas la lecture de Marthaler qui me gene -- oui, c'est particulier mais j'y adhere totalement ! Je dirais c'est plutot du cote de la realisation ou ca rame, ou ca semble un peu rudimentaire, parfois meme amateurish. On est bien loin du sensationnel spectacle munichois de Andreas Kriegenburg [genial de bout en bout!], et aussi du spectacle de Calixto Bieito (excellent DVD super-recommendable). Je ne me plains pas : c'est tres bien mais il y a un petit bug qqpart que j'espere pouvoir diferencier un de ces 4...

Les solistes sont TOUS vocalement excellents. Rien de mal a signaler et je pense qu'on est meme mieux servis que lors de la 1ere serie. OK, on n'a pas le chant de Simon Keenlyside mais sceniquement, AMA, Vincent est un cran au dessus de Simon. Le Texier se defend bien avec ses moyens qui sont bien en place pour ce role. Son probleme est --je pense-- l'endurance et ce forcing en permanence qui le pousse vers la limite ou il commence a aboyer [cf. son St.Francois a Pleyel !]. Aujourd'hui il n'a pas touche ses limites, il etait vraiment bien chantant (dans le cadre de ses moyens!). Sceniquement je le trouve impeccable.
Waltraud Meier --comme je le soulignais souvent-- peut etre geniale ou mauvaise, mais presque jamais entre les deux. Aujourd'hui elle etait vraiment fantastique -- dans une de ses meilleures formes. C'est bien timbre, c'est puissant et elle ne perd jamais le fil : toujours audible et delicate dans chaque ligne de son role. Bravissima! Sceniquement c'est par contre peu convaincant : on dirait la maman de Marie. De plus ce jean particulier ne lui va pas du tout. On ne pouvait pas lui mettre qqchose avec les "manches du pantalon" (fr?) plus larges ?
Stef Margita, comme on l'aime -- la voix qui sonne tant par son timbre que par son volume.
J'aime bcp Kurt Rydl meme si la dernier fois quand je l'ai vu a DOB (Deutsche Oper Berlin) dans Tannhauser, c'etait assez lamentable. Ici il est le docteur parfait! On a du mal a imaginer quiconque faire mieux. C'est tellement lui. La voix vibre mais c'est le metier qui parle... Grandissimo!
Je ne peux pas ne pas souligner le Capitaine par Andreas Conrad -- c'est la voix puissante et alarmante par sa clarte et sa beaute naturelle. Je suis content de savoir qu'on le verra souvent a l'ONP pendant les annees a venir.

Pas bcp d'applaudissements pendant les saluts, ce qui est dommage... Le public parisien ne s'enthousiasme plus pour "Wozzeck" : 1/4 de la salle (au parterre!) etait vide

http://spectacles.premiere.fr, 20.9.2009

La critique de la rédaction

Sous un nom qui claque comme un ordre prussien, Georg Büchner compose à la fin de sa courte vie un chef-d’œuvre inachevé : des fragments de la vie d’un pauvre soldat que la misère matérielle et morale font basculer dans la tragédie. Un siècle plus tard, en 1922, le viennois Alban Berg se passionne pour la pièce et décide, courageusement, d’en faire un opéra, recréant le cauchemar halluciné du héros. On peut dire que dans cette production mise en scène par Christoph Marthaler, l’opéra de Berg, servi par des interprètes de premier rang, en ressort magnifié. Tout se passe de nos jours, dans une immense cafétéria aux couleurs acidulées, entourée par des aires de jeux pour enfants. C’est là que travaille Wozzeck, homme à tout faire, coincé entre un capitaine qui ordonne et un médecin dont il est le cobaye. Les enfants courent, des jeunes gens boivent et chantent. Vincent Le Texier, qui interprète le héros, est absolument déchirant. Voix chaude de baryton-basse, haute stature, il allie une parfaite maîtrise de la partition et un jeu habité par le désespoir, le dépit et la folie. Face à lui, la soprano wagnérienne Waltraud Meier, qui incarne Marie, enflamme le plateau de sa voix brûlante et par un jeu totalement moderne. Ces deux-là, avec l’orchestre dirigé formidablement par Hartmut Haenchen, font de cette production idéale un moment de pur bonheur.

Hélène Kuttner

AFP, 18.9.2009

La dircetion musicale de l'Allemand Hartmut Haenchen, chef attentif aux voix et á l'expression thèatrale. est vèhèmente et cependant lyrique.

http://www.concertonet.com, 17.9.2009

Est-ce innocent ? Programmer en même temps Mireille mis en scène par lui-même, Wozzeck revisité par Christoph Marthaler et Le Barbier de Séville imaginé par Coline Serreau témoigne sans doute, de la part de Nicolas Joel, d’une volonté d’affirmer une rupture. Cette Mireille et ce Wozzeck sont en effet le jour et la nuit, même si le metteur en scène suisse ne s’est pas livré ici à un massacre en règle comme pour Les Noces de Figaro, voire pour La Traviata. Cette production, une des moins contestables de l’ère Mortier, fondée sur une direction d’acteurs étonnante de précision, n’emporte pourtant pas une adhésion totale. Le décor unique de la cantine façon RDA – une manie chez Marthaler et sa décoratrice attitrée Anna Viebrock – évacue la nature qui joue un rôle essentiel dans l’opéra et, surtout, casse le rythme qu’a imprimé le compositeur à l’enchaînement quasi cinématographique des tableaux de la partition. Un rythme que ne remplace pas l’agitation des figurants sur le plateau, alors que le jeu des personnages est si concentré, à commencer par celle des enfants sur laquelle donne la cantine – et l’omniprésence du pianiste déjanté paraît décidément bien gratuite. Cela dit, les rapports entre les personnages ont rarement paru aussi vrais, d’un Wozzeck agent de sécurité essuyant nerveusement les tables, agité de troubles obsessionnels compulsifs, exclu des autres et de lui-même, jusqu’à un Tambour major tête à claques habillé en punk. Un univers sordide, où la folie le dispute à la grossièreté, le morbide au trivial, où les enfants sont condamnés d’avance, où Marie fait figure de victime, presque d’ange déchu.


Il est vrai que Waltraud Meier trouve toujours là un de ses plus grands rôles, avec un aigu insolent – le médium, comme souvent chez les mezzos reconverties, paraît beaucoup plus discret -, une intelligence rare des mots et de la musique, un jeu très sobre où chaque geste, chaque expression a un sens. Oui, une sorte d’ange déchu, pécheresse malgré elle, dont la fierté se redresse dans un « Rühr mich nicht an » à vous faire frissonner, dont l’humilité se love dans une lecture de la Bible à vous faire pleurer. Elle n’a donc rien à envier à Angela Denoke. Vincent Le Texier, lui, ne fait pas oublier un Simon Keenlyside vocalement plus assuré, presque trop peut-être : la voix, si elle semble plutôt moins engorgée et se projette plutôt mieux que d’habitude, atteint parfois ses limites et menace de se rompre. Mais cela, finalement, ne messied pas au personnage, surtout tel qu’il le conçoit, et le timbre, plus gris, la tessiture, plus grave, le rendent plus sombre, plus désespéré, plus renfermé – on ne dira jamais assez à quel point, chez Wozzeck, compte la couleur de la voix, de laquelle le chanteur français joue assez subtilement. Et l’on sent ici une authentique caractérisation, une violence à peine contenue, alors que le baryton anglais semblait plus résigné. Les autres chanteurs ne marquent pas moins leur rôle : Tambour major arrogant de Stefan Margita, Capitaine hystérique d’Andreas Conrad, qui piaille ses aigus de fausset sans les escamoter, Docteur mégalo de Kurt Rydl, portant encore fort beau. Bref, on ne perd pas au change avec cette nouvelle distribution – de celle de 2008, seuls demeurent la Margret d’Ursula Hesse Von Den Steinen et le Deuxième Apprenti d’Igor Gnidii.


Le remplacement de Sylvain Cambreling par Hartmut Haenchen, en revanche, est une aubaine. Le chef français – un peu trop systématiquement brocardé d’ailleurs – n’habitait pas ses lenteurs et émoussait la tension dramatique au profit des détails – ce qui, dans une partition aussi concentrée, parfois haletante, constitue un contresens. Hartmut Haenchen, d’abord, éclaire par sa précision toute la richesse des couleurs de l’instrumentation, replaçant d’ailleurs l’œuvre dans l’esthétique de l’Ecole de Vienne plus que dans l’héritage de Mahler. Sa direction, de plus, n’évacue pas le théâtre, portant souvent la tension à son comble, notamment dans la scène où Marie cède au bellâtre à quatre sous. Mais elle reste lyrique, avec un très bel interlude au dernier acte, même si elle se garde - un peu trop ? - de tout expressionnisme pour mieux préserver les fondements d’une structure qui, aujourd’hui, fascine, voire intimide encore les compositeurs d’opéra.
Didier van Moere

www.altamusica.com17.9.2009

Inauguré il y a déjà deux saisons, le Wozzeck de Marthaler, l’une des plus grandes réussites de l’ère Mortier à l’Opéra de Paris, est repris à la Bastille conjointement aux débuts de Nicolas Joel dans Mireille à Garnier. En somme le jour et la nuit en matière de théâtre, dans une production d’une puissance intacte, servie par une équipe musicale renouvelée mais toujours à l’avenant.

Les productions de Marthaler, connu pour être le plus souvent absent lors des reprises, ont ceci de frustrant qu’elles s’essoufflent très vite. Ainsi, les Noces de Figaro présentées au Palais Garnier au printemps 2006 n’étaient plus que l’ombre de celles, diablement stimulantes, nées à Salzbourg en 2001. De même, le Tristan questionnant de Bayreuth 2005 a-t-il subi les ravages d’une désertification théâtrale dès l’année suivante et jusqu’à cet été. On est donc heureux ce soir de constater que son Wozzeck, probablement la plus aboutie de ses productions récentes, n’a pas perdu une once de sa puissance théâtrale.

Du nouveau plateau, qui accuse assez bien la différence de conception vocale des équipes de Gerard Mortier et Nicolas Joel, on retiendra le rapprochement de la typologie traditionnelle associée à l’ouvrage : un Wozzeck sombre et moins jeune, une Marie authentiquement mezzo, un Capitaine plus ténor de caractère, un Docteur basse profonde ; et une volonté chez chacun de chanter, de privilégier les hauteurs sur le vrai mélange de parlé-chanté offert par le Sprechgesang.

Vincent Le Texier avait la lourde tâche de succéder au Wozzeck de Simon Keenlyside, et se tire dignement d’une prise de rôle toujours périlleuse, en assumant le poids de la tradition des anti-héros à l’émission grise, à la Toni Blankenheim. On ne cherchera toutefois pas dans cette approche scrupuleuse une véritable incarnation, car le Français tente avant tout d’assurer le texte – soigneusement articulé – et les notes – parfois au bord de l’accident – avec une réelle monotonie dans l’expression et sans parvenir à laisser une empreinte dramatique ou littéraire.

Waltraud Meier, plus middle-class que le commun des Marie, campe un personnage extra-terrestre, trop humain au milieu des fous, qui aurait pu, dans un univers moins délétère, devenir quelqu’un, et surtout d’une vocalité caméléon, avec ce médium ardent qui n’appartient qu’aux mezzos, cet art du mot, de la déclamation, d’une complexité psychologique riche de contradictions, tout sauf univoque. Quant à l’aigu, son tendon d’Achille, la grande Waltraud en assume crânement les limites, chuintements et feulements, en délivrant notamment un Rühr’ mich nicht an ! aussi crucifiant que le Lachte ! de sa Kundry.

Dans la lignée des plus géniaux couineurs, les Gerhard Stolze et Heinz Zednik, Andreas Conrad compte parmi les tout meilleurs Capitaine : aiguisé, sadique, avec ce mélange d’instrumentalité et de contorsions vocales, cette dissection convulsive du texte typique des personnages de petits nazillons hystériques, forte d’une projection qui ne sacrifie jamais le sens aux seuls décibels.

La déclamation, voilà tout le poids de la différence dans l’excellence entre ce Hauptmann et le Docteur de Kurt Rydl, forcément plus en voix que Roland Bracht mais assez mou de débit et abusant des effets épouvantail, avec un timbre qu’on souhaiterait plus concentré, même si ce genre de voix kolossale fait toujours son effet auprès du public.

Enfin, si Jon Villars n’avait jamais été aussi incontestable qu’en punk bouffi de beaufitude, Stefan Margita, moins impressionnant d’héroïsme, est un Tambourmajor plus répugnant encore par sa perversité, jouant d’effets fielleux plus ambigus. La principale déception proviendrait de Xavier Moreno, dont l’Andrès manque de pure radiance pour pleinement convaincre, à l’inverse de l’Idiot tout en immatérialité de François Piolino, qui campe ce Yurodovi germanique avec un art consommé de la voix de tête.

Une direction de théâtre
Hartmut Haenchen, qui a compris aussi bien que Sylvain Cambreling avant lui le bénéfice à tirer d’un décor bas de plafond canalisant à merveille les voix, dirige aux antipodes de son prédécesseur : vif, théâtral, avec la fulgurance, l’alacrité qui faisaient tant défaut à sa Lady Macbeth de Chostakovitch.

Beaucoup plus analytique, le chef français exaltait davantage le glauque et la modernité d’une partition ce soir projetée d’emblée dans le vif du drame, avec des silences écourtés et un impact sonore immédiat obtenus souvent au détriment de la précision rythmique. Mais qu’importe, car après un Parsifal très contestable et le Chostakovitch précité, on retrouve le Haenchen de l’urgence théâtrale, que laissait peu présager le minutage erroné du spectacle (1h50) indiqué sur le site Internet de l’Opéra, alors que le drame est bouclé en tout juste une heure et demie.
Qu’il est regrettable, dans ces conditions d’excellence et alors que Mireille croule sous les demandes de places inassouvies, de voir des rangées entières de fauteuils de première catégorie laissés en jachère…
Yannick MILLON

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http://fomalhaut.over-blog.org
Vous voulez vivre les débordements sentimentaux de la vie. Alors Mireille est pour vous, à condition que vous arriviez à obtenir une entrée à l’Opéra Garnier.
A moins que ce ne soit un autre aspect de la vie qui vous intéresse, sa violence et la manière dont elle se diffuse et se restitue, sans qu’au bout du compte l’on sache qui est victime ou bien bourreau.

Rien que pour vous Harmut Haenchen pousse l’Orchestre de l’Opéra de Paris dans ses dimensions les plus extrêmes, comme un corps grand ouvert d’où battent les pulsations d’un cœur à vif dans une direction, se fracassent ailleurs des matériaux métalliques d‘une intensité qui tente de saturer l‘auditeur, puis émergent des sonorités frémissantes, une pâte sonore large qui vous agrippe et ne cherche nullement à charmer.

Sylvain Cambreling avait paru bien lyrique lors de la création, il y a deux ans.
Aujourd’hui il s’agit également d’harceler le spectateur.

Vincent Le Texier n’est plus un Wozzeck intériorisé. Il renvoie sa souffrance, semble plus proche d’une déchéance spirituelle et physique immédiate, son sort est déjà réglé. Le timbre n’est pas aussi beau que Simon Keenlyside, mais nous avons ici un rôle encore plus crédible, où pitié et malaise se mélangent.

Du côté des méchants, Kurt Rydl est un docteur absolument sordide, lorsque le vibrato de son chant, combiné à la musique, conduit vers le mal au cœur.
Que ce soit Andreas Conrad, aux aigus inhumainement saillants, ou bien Stefan Margita d’une liberté expressive surprenante, c’est un entourage infernal qui enserre le pauvre marginal.

Waltraud Meier est à cette occasion dans une forme vocale que certains n’attendent sans doute pas. Entendez simplement son cri « Rühr’ mich nicht an! (Ne me touche pas!) ». Demain il résonnera encore.
Elle a ici la dimension d’une femme mûre, bien moins inconsciente que ne l’incarnait Angela Denoke à la création, mais paraît aussi un peu étrangère à cette vie sans espoir autour d’elle.

Cette reprise de la production de Christoph Marthaler qui repose sur plusieurs points forts - le rapport vitalité des enfants/vitalité de la musique, l’exclusion qui se détermine dès l’enfance, la complexité du décor unique et de ses éclairages, le pianiste qui fuit subitement l'hystérie générale - est à nouveau d’une force phénoménale, un prolongement plus que nécessaire du travail théâtral qu’a effectué Gerard Mortier pendant cinq ans.

http://opera.forumpro.fr

Et pour couronner le tout un Haenchen très en verve qui parvient à rendre la musique de Berg bien plus accessible qu'avec d'autres direction, avec un petit faible pour le final, juste avant le chœur d'enfants qui clos l'œuvre.
ZURÜCK