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19. Mai 2010 · Paris, Salle Pleyel, 20.00 Uhr

Bohuslav Martinu: Lidice; Alfred Schnittke: Konzert für Viola und Orchester; Ludwig van Beethoven: Sinfonie Nr. 5 c-Moll

Orchestre de Paris
Tabea Zimmermann (Viola)

Das Konzert wird von Radio France für eine spätere Sendung aufgezeichnet. Die Sendung ist hierbis zum 2. Juli 2010 zu hören

Pressestimmen

L’Orchestre de Paris présentait lors de cette soirée trois compositeurs de styles – et d’époques – différents. Cependant, les œuvres jouées, consciencieusement choisies, se faisaient écho les unes les autres, donnant un sens et une saveur particuliers au programme.

Dans la première pièce, un poème symphonique de Bohuslav Martinů, composé en souvenir du village tchèque de Lidice, rasé durant la Seconde Guerre Mondiale, l’orchestre de Paris s’est montré uni et émouvant. L’œuvre reprend d’ailleurs les premières notes de la Symphonie du Destin de Beethoven, présentée en deuxième partie de soirée. Néanmoins, le résultat apparaît mitigé : le jeu des cordes fut souvent trop sec, trop abrupt, pour véritablement porter l’œuvre comme il aurait pu le faire. Hartmut Haenchen a tout de même tenté, de par sa conduite expansive, d’apporter à cette œuvre principalement harmonique la profondeur dont elle a besoin pour nous offrir tout ce qu’elle détient.

Puis, le Concerto pour alto et orchestre d’Alfred Schnittke, qui rompt totalement avec l’ambiance induite par Lidice. Dans ce morceau contrasté – présentant de plus des styles très variés, allant du néo-classique langoureux jusqu’au contemporain abstrait – l’altiste Tabea Zimmermann fait montre de toutes ses qualités. La technique, le son, le cœur et l’âme y sont, que ce soit dans des passages violents, où l’alto semble courir, voire fuir l’orchestre, ou dans la rêverie presque classique du deuxième mouvement, que les accords de clavecin, de célesta et de cloches tubulaires transforment peu à peu en cauchemar. L’alto, toujours présent mais jamais supplanté par l’orchestre dans une partition où il joue presque en permanence, dialogue également avec de nombreux instruments, jusqu’à la fin du morceau où la musique s’éteint dans une mort lente et amère.

Pour terminer, la Symphonie n°5, de Ludwig van Beethoven, qu’on ne présente plus. L’interprétation fut assez satisfaisante, mais malheureusement les cordes y ont retrouvé les travers de Lidice qu’elles avaient momentanément oublié dans le Concerto pour alto : leur jeu manquait de clarté, de netteté, en particulier dans les premier et troisième mouvements, ce qui a porté un léger ombrage à l’esprit de l’œuvre, malgré la direction alors presque grandiloquente de Hartmut Haenchen. Dans le deuxième mouvement, ainsi qu’à la fin, plus mozartienne, du morceau, les cordes et l’orchestre en général sont apparus plus à leur aise.
Romain Paulino
http://www.resmusica.com · 26. Mai 2010
Alto et orchestre symphonique

Chef de haute tradition germanique étonnamment méconnu, Hartmut Haenchen dirige Martinu, Schnittke et la Cinquième Symphonie de Beethoven.
Ses apparitions dans la fosse de l’Opéra Bastille ont familiarisé le public parisien avec la direction raffinée et précise d’Hartmut Haenchen, un chef formé à l’école est-allemande dont l’art n’est pas sans quelque parenté avec celui du regretté Kurt Sanderling. Pour ses débuts à la tête de l’Orchestre de Paris, il a choisi un pilier du répertoire, la Cinquième Symphonie de Beethoven mais aussi deux partitions du xxe siècle qui dialoguent avec des répertoires plus anciens. Évocation d’un village martyr qui eut un sort similaire à celui d’Oradour-sur-Glane, Mémorial pour Lidice de Martinu joue sur les atmosphères quand le Concerto pour alto de Schnittke – joué par la grande Tabea Zimmermann – fonctionne davantage par réminiscences.
http://www.journal-laterrasse.com · 25. Mai 2010
J'ai récemment réalisé avec stupeur que j'ai pratiquement délaissé l'Orchestre de Paris cette année, pourtant un de mes orchestres-chouchou : l'oubli est réparé (un peu) avec ce concert, dont le programme est mitonné aux petits oignons : deux œuvres relativement rares, qui font toutes deux des clins d'œil à la 5è de Beethoven, nous signale la note de programme. Quant à la 5è, elle est si connue que, finalement, on ne l'entend pas si souvent..

La perspective d'écouter du Schnittke me rend un peu anxieuse : Schnittke a le don de me vriller les tripes, et mes tripes sont facilement vrillables. Bref. Contre toutes mes attentes, le Martinu m'affecte particulièrement : quelque chose d'immensément douloureux, mais très digne dans cette belle pièce paisible, résignée me parle - quand l'œuvre se termine, j'ai l'œil humide et la gorge serrée.

Je me remets de mes émotions alors qu'une petite armée de techniciens s'affairent sur le plateau : pour le concerto, pas de violons - il faut donc installer les altos à la gauche du chef, les violoncelles à la place des altos, et les contrebasses à la place des altos, c'est-à-dire à la droite du chef, tout près. Corollaire : la fantastique alto solo de l'Orchestre de Paris, la maître-à-penser des altistes de France et de Navarre, celle qui ne se trompe jamais*, occupe enfin la place qui lui revient de droit : la chaise du premier violon solo, à droite du chef.

Elle est rejointe par sa consœur, Tabea Zimmermann (quelle allure! quelle classe!), pour le concerto de Schnittke. Elle a une présence époustouflante, un son clair, riche, assuré, tel qu'elle pourrait jouer n'importe quoi et tétaniser son audience. Un ami croisé à l'entracte regrette toutefois qu'elle n'ait pas choisi une couleur plus 'Chostakovitch' pour le concerto - je suppose qu'il voulait dire par-là quelque chose de plus rugueux, douloureux ? En tout cas, je me régale ; au lieu de me morfondre à écouter l'orchestre se déliter, la pièce se déconstruire (cette ambiance de fin du monde est redoutablement éprouvante) je peux savourer le son magnifique de son alto - comme un violon magnifiquement joué (mais en tellement mieux) et me laisser porter par son jeu enchanteur.

Au retour de l'entracte, chacun reprend sa place. L'effectif de l'orchestre** me paraît plus adapté à du Bruckner/Malher qu'à la 5è de Beethoven, mais qu'importe ! Ça marche aussi avec du gros son. Depuis mon arrière-scène bien-aimée, on profite tellement bien des effets de spatialisation qu'a mitonné Beethoven : on pourrait presque voir les vents s'échangent des petits motifs, ou les envoyer vers les cordes et vice-versa. Dans le fugato - pris à toute allure , j'ai l'impression de voir la musique tourner dans le sens des aiguilles d'une montre, d'un pupitre de cordes à l'autre. C'est certainement une des spécificités les plus attachantes de cette partie de la salle Pleyel.

L'orchestre est au taquet (comment ne le serait-on pas ? Il y a tant de petites choses réjouissantes à jouer dans cette symphonie ! Des petits pianissimos plein de retenue ! De grands fz et fffffff jouissifs ! Et cette montée en tension depuis la deuxième moitié de l'Andante !). Au plaisir de l'écouter se superpose le souvenir des émotions ressenties la dernière fois que j'ai eu l'occasion d'en jouer un extrait, et je n'arrive ainsi plus du tout à me contenir pendant le 4è mouvement : je bondis sur mon fauteuil, tape des pieds, lance de grands coups de menton décidés pour les accords de fin, éprouvant ainsi la patience de mes voisins, qui ne semblent pas m'en tenir rigueur - merci.
Le public est au taquet aussi ! Une généreuse partie du public applaudit chaleureusement à la fin des premiers et deuxième mouvements - et mes paumes brûlent d'envie d'applaudir - comment pourrait-on ne pas avoir envie d'applaudir ? Ces accords finaux sont faits pour déclencher un besoin irrésistible de frapper dans ses mains, c'est physique. Je dois retenir une envie terrible d'applaudir après un solo de basson, mon bassoniste préféré est de service, et j'aime le basson, surtout chez Beethoven.

Je rentre à la maison, traversant Paris dans les traces d'un des cuivres de l'orchestre (qui manifestement est un voisin (coucou!)) qui finit par me regarder d'un œil inquiet après avoir remarqué mes regards insistants et curieux en direction de sa boîte à instrument. Soyez rassurés, je n'ai jamais agressé d'instrumentistes, ni volé d'instruments de musique - même si j'ai parfois été tentée.
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* Elle ne se trompe jamais. Si vous aviez l'impression un jour qu'elle s'est trompée, cela signifie sûrement que le reste de l'orchestre s'est plantée. Axiome : ABC ne se trompe jamais. (physiquement impossible)
** Huit contrebasses ! Une dizaine de violoncelles et altos ! Foultitude de cordes ! Chez les vents et cuivres, l'effectif reste raisonnable. L'effectif réduit, c'est pour le concert du lendemain !
http://www.klariscope.com · 21. Mai 2010
http://palpatine42.free.fr 20.5.2010

L'immense Harmut Haenchen est à la baguette. Ce chef est toujours l'un des meilleurs au monde -- et lui, on sait pourquoi.
Très bonne interprétation.
http://palpatine42.free.fr · 20. Mai 2010
Bien qu’âgé de 67 ans, Hartmut Haenchen n’a été que récemment découvert en France, notamment en raison d’un début de carrière accompli de l’autre côté du «rideau de fer». Directeur musical de l’Opéra des Pays-Bas de 1986 à 1999, il s’est d’abord fait connaître à Paris par ses prestations remarquées à Bastille et à Garnier dans Salomé, Capriccio, Parsifal, Lady Macbeth et Wozzeck. Mais il a également abordé le domaine symphonique, que ce soit avec l’Orchestre de l’Opéra en juin 2007 (voir ici) ou, remplaçant Mikko Franck, avec le Philharmonique de Radio France en juin 2009 (voir ici). En 2010, il poursuit sa prise de contact avec les formations de la capitale: avant de diriger le National le 9 décembre prochain au Théâtre des Champs-Elysées dans Un requiem allemand de Brahms, il est invité pour la première fois par l’Orchestre de Paris.

Il n’est jamais trop tard pour bien faire: alors que le cinquantenaire de la mort de Martinů (1890-1959) est passé quasiment inaperçu dans un pays qui l’accueillit pourtant durant près de 20 ans, son opéra Mirandolina sera présenté à plusieurs reprises fin juin à Bobigny par l’Atelier lyrique de l’Opéra national de Paris et, dès les 2 et 3 juin, Les Fresques de Piero della Francesca seront données par Paavo Järvi et l’Orchestre de Paris. En attendant cet important triptyque de son ultime période créatrice, la soirée s’ouvre sur une brève page antérieure, Mémorial pour Lidíce (1943). Minutieux, attentif aux équilibres et aux timbres, le chef allemand confère une grande solennité à cet hommage à l’Oradour tchèque, dont la population fut assassinée par les Nazis en juin 1942.

Si sa conclusion tend également vers une forme d’apaisement, le Concerto pour alto (1985) de Schnittke n’en est pas moins lui aussi dominé par les teintes sombres, cauchemar tantôt tragique, tantôt grotesque, évoluant au gré des collisions stylistiques typiques du compositeur. Fondée sur les notes résultant de la transcription selon le système allemand de six des lettres formant le nom de son dédicataire et créateur, Youri Bashmet, la partition se caractérise en outre par un instrumentarium original, excluant les violons mais requérant piano, clavecin et harpe ainsi qu’une importante section de percussions (six exécutants), notamment métalliques. Jouant presque sans cesse pendant un peu plus d’une demi-heure émaillée de nombreuses cadences, Tabea Zimmermann (née 1966) se montre la digne héritière de son aîné russe: une performance impressionnante tant par la qualité de son phrasé que par sa puissance ou sa sonorité, magnifique sur toute la tessiture de l’instrument. L’altiste allemande trouve encore l’énergie d’offrir en bis une adaptation de l’Andante de la Deuxième sonate pour violon de Bach.

La seconde partie de ce court programme est entièrement consacrée à la Cinquième symphonie (1808) de Beethoven – Martinů en citait dans son Mémorial les quatre premières notes, dont le rythme (trois brèves et une longue) correspond au code morse de la lettre «V», initiale churchillienne de la victoire. Pour sa rencontre avec le plus historiquement beethovénien des ensembles de la capitale, Haenchen, à la tête d’un effectif devenu presque inhabituel de nos jours (60 cordes), joue certes la carte de la tradition et de la puissance, mais sans excès de monumentalisme: ainsi les points d’orgue du premier mouvement sont-ils à peine prolongés, à l’image d’une direction volontiers dramatique tout en demeurant attentive aux détails et aux différents pupitres – il est vrai qu’elle peut s’offrir le luxe d’être hédoniste grâce aux merveilleux bois de l’Orchestre de Paris.
Simon Corley
www.concerto.net · 20. Mai 2010