http://www.planet-opera.com, 17. März 2011
Musicalement, Hartmut Haenchen tient remarquablement bien le Philharmonique de Radio France. toute la richesse de la partition est superbement présentée. J'ai conscience de la naïveté de cette phrase et pourtant : les sombres sont ici sombres, les exultations de joie exultent. Nous ne sommes pas dans une retenue de bon aloi au prétexte de faire chic. Mais nous n'avons pas non plus de débordements inutiles. Le ton est juste. L'harmonie est parfaite avec le travail de Kulik : nous comprenons sans exagération.
Le choeur a quelques difficultés dès lors qu'il se trouve sur scène car il voit moins bien le chef, en raison du dispositif scénique. Or ce choeur a besoin de tenue sinon, il part vite dans ses errements. Et - mais j'aurais dû commencer par cela - étant placé dans la fosse pour toute la première partie, il produit des merveilles ; Hartmut peut les surveiller...
http://www.ruedutheatre.eu, 17. März 2011
Le plus convaincant dans ce spectacle reste la musique, éclatante, telle qu'elle fut réorchestrée par Mozart en 1789 sur le livret traduit en allemand. Le musicien, qui venait d'achever « Don Giovanni », a supprimé quelques airs répétitifs typiquement baroques (dits « da capo ») et a ajouté force flûtes, clarinettes et cors, doublé les cuivres, ce qui confère à l'oeuvre un brillant et une force expressive nouvelle. Cette partition à l'architecture cosmique, qui culmine dans le fameux « Alléluia », est magnifiquement servie par le Choeur du Châtelet et l'Orchestre philharmonique de Radio France, dirigés par le grand spécialiste Hartmut Haenchen.
Le Figaro, 16. März 2011
Un Messie éprouvant au Châtelet
Interprétation éteinte pour cette version discutable de l'œuvre de Händel.
On aimerait vous raconter la fin du spectacle, la réaction du public. On n'a pas tenu jusque-là. Ce n'est pas très professionnel de partir à l'entracte alors que l'on doit faire le compte rendu de la soirée, mais ce n'est qu'au deuxième entracte que l'on a craqué. Sans savoir exactement ce que l'on avait vu et entendu, mais en sachant que c'était bien éprouvant.
Cela ressemblait à une installation du plasticien russe Oleg Kulik, librement inspirée du Messie de Händel. Deux popes venaient chanter à l'avant-scène, face à un dispositif relevant d'une imagination visuelle foisonnante et de moyens d'expression variés, de la danse à la vidéo en passant par la sculpture. On a vu des robots dotés d'un compteur, des projections qui élargissaient les dimensions de la scène. Mais comme on est critique musical et non critique d'art, on manquait de critères pour analyser ce que l'on voyait.
Chœur massif
Pendant ce temps-là, le Messie de Händel retentissait dans la fosse. C'était la version orchestrée par Mozart et chantée en allemand, curiosité musicologique intéressante, sans qu'il soit possible de savoir si ce choix était lié à la réalisation scénique. On avait engagé le Philharmonique de Radio France, dont ce n'est pas vraiment le répertoire, et mis à sa tête le chef allemand Hartmut Haenchen, excellent wagnérien et bon connaisseur du répertoire baroque dans une esthétique germanique d'autrefois. À la tête d'un orchestre aux bois superbes mais aux cordes épaisses, et d'un chœur massif, il a donné de la jubilatoire musique de Händel une interprétation éteinte et sentencieuse, on ne saurait dire si cette mollesse empesée répondait au projet plastique.
Entre les actes, on a entendu le philosophe Michel Serres déclamer d'une voix monocorde des commentaires simplistes et lénifiants sur la Bible. Là encore difficile de déterminer si cette naïveté new age était en rapport avec l'univers du plasticien. On est peut-être passé à côté d'un chef-d'œuvre, mais, en attendant, on a été bien agacé.
Christian Merlin