Sinfoniekonzerte

La Depeche, 15. Juni 2018
...Le chef allemand a conduit une Neuvième symphonie de Mahler au parfum d'éternité, techniquement très maîtrisée. Un grand moment. Les ensembles d'instrument anciens sont aussi les bienvenus chez les Grands Interprètes....

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www.concertonet.com, 09. April 2018
Le Mahler douloureux de Hartmut Haenchen
Rien de plus passionnant que d’entendre, un mois après Daniel Harding, Hartmut Haenchen dans la Neuvième Symphonie de Mahler – il remplace Myung-Whun Chung. Tous les deux partagent le goût de la transparence polyphonique et le refus de l’épaisseur. Mais l’Allemand va sans doute plus loin, avec une conduite encore plus unitaire du discours. Si son Andante comodo annonce Schoenberg, ce pourrait être déjà celui des Variations opus 31. Et l’on y perçoit une émotion que l’Anglais ne libérait que pour un lumineux Adagio final. Chez Haenchen, le premier mouvement baigne déjà dans une atmosphère de noirceur désespérée: direction plus visionnaire, plus mahlérienne – du moins si l’on associe Mahler, surtout celui-là, à un certain expressionnisme. Le Ländler trahit déjà, au-delà du trois temps faussement bonhomme de la danse paysanne, une ironie qui deviendra grinçante dans le Rondo-Burleske, remarquablement construit, dont la direction met les arêtes à vif – ces mouvements centraux constituaient le point faible de Harding, sans doute parce qu’il lorgnait plutôt vers la musique pure. Il jetait une clarté apollinienne sur l’Adagio, Haenchen y privilégie le clair-obscur, comme si la douleur restait latente, ce qui le rend plus poignant encore. La différence entre les deux approches tient finalement à leur rapport à une tradition dont Haenchen se veut l’héritier – il a consulté la partition annotée de Willem Mengelberg. L’orchestre, magnifique, sonne plus allemand ici que l’Orchestre de Paris, auquel il n’a rien à envier ... L’homogénéité des cordes, la rondeur des vents, avec des solistes qui se surpassent, sont celles des très grands soirs.
Didier van Moere
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www.larevueduspectacle.fr, 08. April 2018
Hartmut Haenchen, un chef d'exception à la tête du Philharmonique de Radio France
Étonnamment, le chef allemand Harmut Haenchen se fait rare en France depuis son magnifique "Parsifal" à Bastille en 2008. Ces derniers temps, mise à part l'invitation en 2017 par l'Opéra de Lyon (pour une "Elektra" sublime et un "Tristan" remarquable au Festival "Mémoires"), on l'appelle bien souvent pour remplacer tel ou tel chef souffrant, dans un répertoire germanique ... qu'il porte aux sommets.
Ce fut le cas au Festival de Saint-Denis en 2017 pour "Das Lied von der Erde". Et c'est encore à une invitation de dernière minute pour diriger le concert Mahler de Radio France ... que l'auditeur doit le plaisir aigu de le retrouver à l'Auditorium. Le chef allemand, bien qu'âgé de soixante-quinze ans, affiche toujours une forme et une fraîcheur intactes avec une direction d'un engagement total pendant les quatre-vingt minutes de la 9e Symphonie de Gustav Mahler. ...
Le noble chef originaire de Dresde a amené avec lui le premier violon Kai Vogler ..., dont les échappées brillantes n'éclipsent pas le solide travail réalisé avec les musiciens pendant le concert.
L'Andante initial ... se fait d'abord marche funèbre ; puis Hartmut Haenchen libère les forces telluriques du Philharmonique, extrêmement concentré, très impliqué et constamment virtuose. Observer les musiciens de l'orchestre sera tout simplement un bonheur.
De façon inédite donc, les mouvements lents "Andante commodo" et "Adagio" ouvrent et concluent cette symphonie en quatre mouvements, encadrant un "Ländler" et un "Rondo-Burleske" vifs. Le noble chef originaire de Dresde a amené avec lui le premier violon Kai Vogler (Premier Violon solo de la Staatskapelle Dresden), dont les échappées brillantes n'éclipsent pas le solide travail réalisé avec les musiciens pendant le concert.
Les dialogues d'instruments à instruments, de pupitres à pupitres, prennent bientôt le pas sans pouvoir maintenir un discours continu dans ce monde apocalyptique, qui ne retrouve un nouvel ordre que pour le voir s'effondrer aussitôt. Hartmut Haenchen organise ce chaos, fait chanter ou grincer les solistes, les duellistes, les masses orchestrales en une brillante odyssée de timbres, soignant comme il sait le faire les enchaînements, en orfévrant les dynamiques.
Les mouvements suivants fascineront tout autant, vrai voyage dans les limbes comme au ciel, avec ses élans vitaux, ses paroxysmes fulgurants et naturellement, jamais loin avec l'ironie et la cocasserie faisant place au plus poignant lyrisme .... L'intégrité légendaire du chef (quant aux indications des compositeurs), sa quête, la hauteur de sa vision emportent l'orchestre au sommet espéré que mérite cette musique exigeante, incroyablement difficile à exécuter.
Hartmut Haenchen, avec cœur et âme, livre tout simplement une des plus belles et des plus denses versions entendues jusque dans le dernier mouvement "adagio", pur chant de sérénité et de tendresse qui offre un dernier frisson. De son fortissimo enivrant au diminuendo incroyable de maîtrise, avec ses vagues montantes et refluantes aux lignes nettement dessinées, jusqu'à l'extinction ultime ..., l'adieu malhérien offre une échappée vers une autre dimension, "anywhere out of the world" - avec une des fins les plus impressionnantes de toute l'histoire de la musique, saluée par un silence plein d'une bonne minute ensuite .... On ne redescend pas aisément de telles cimes.
Christine Ducq
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www.larevueduspectacle.fr, 08. April 2018
Hartmut Haenchen, un chef d'exception à la tête du Philharmonique de Radio France
Le 29 mars, le chef Hartmut Haenchen livrait une prodigieuse neuvième symphonie de Gustav Mahler à la tête d'un Orchestre Philharmonique de Radio France en état de grâce.

Étonnamment, le chef allemand Hartmut Haenchen se fait rare en France depuis son magnifique "Parsifal" à Bastille en 2008. Ces derniers temps, mise à part l'invitation en 2017 par l'Opéra de Lyon (pour une "Elektra" sublime et un "Tristan" remarquable au Festival "Mémoires"), on l'appelle bien souvent pour remplacer tel ou tel chef souffrant, dans un répertoire germanique (en gros la sainte Trinité Wagner, Mahler, Strauss) qu'il porte aux sommets. ...
Le chef allemand, bien qu'âgé de soixante-quinze ans, affiche toujours une forme et une fraîcheur intactes avec une direction d'un engagement total pendant les quatre-vingt minutes de la 9e Symphonie de Gustav Mahler.
L'Andante initial - très admiré par Alban Berg à qui Alma avait offert la partition manuscrite de l’œuvre - se fait d'abord marche funèbre ; puis Hartmut Haenchen libère les forces telluriques du Philharmonique, extrêmement concentré, très impliqué et constamment virtuose. Observer les musiciens de l'orchestre sera tout simplement un bonheur.

Les dialogues d'instruments à instruments, de pupitres à pupitres, prennent bientôt le pas sans pouvoir maintenir un discours continu dans ce monde apocalyptique, qui ne retrouve un nouvel ordre que pour le voir s'effondrer aussitôt. Hartmut Haenchen organise ce chaos, fait chanter ou grincer les solistes, les duellistes, les masses orchestrales en une brillante odyssée de timbres, soignant comme il sait le faire les enchaînements, en orfévrant les dynamiques.

Les mouvements suivants fascineront tout autant, vrai voyage dans les limbes comme au ciel, avec ses élans vitaux, ses paroxysmes fulgurants et naturellement, jamais loin avec l'ironie et la cocasserie faisant place au plus poignant lyrisme (et quelles mélodies !). L'intégrité légendaire du chef (quant aux indications des compositeurs), sa quête, la hauteur de sa vision emportent l'orchestre au sommet espéré que mérite cette musique exigeante, incroyablement difficile à exécuter.

Hartmut Haenchen, avec cœur et âme, livre tout simplement une des plus belles et des plus denses versions entendues jusque dans le dernier mouvement "adagio", pur chant de sérénité et de tendresse qui offre un dernier frisson. De son fortissimo enivrant au diminuendo incroyable de maîtrise, avec ses vagues montantes et refluantes aux lignes nettement dessinées, jusqu'à l'extinction ultime (marquée "quadruple piano"), l'adieu malhérien offre une échappée vers une autre dimension, "anywhere out of the world" - avec une des fins les plus impressionnantes de toute l'histoire de la musique, saluée par un silence plein d'une bonne minute ensuite (une éternité à la radio qui diffusait le concert). On ne redescend pas aisément de telles cimes.
Christine Ducq

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www.altamusica.com, 07. April 2018
"... D’un tempo extrêmement lent ressort alors surtout la sensibilité de l’Andante comodo....
concentrons-nous sur ce que nous avons entendu en présence d’un remplaçant de luxe, le chef de 75 ans Hartmut Haenchen. ... L’introduction de l’Andante comodo débute alors très lentement, avec une véritable retenue qui contient l’émotion, aux cordes comme à la harpe, puis grâce aux coups de timbales nets. ...

Haenchen parvient à créer une véritable tension dès la partie Mit Wut - Allegro risoluto, avec un beau frottement des cordes graves et une belle montée nerveuse grâce aux premiers violons. Puis il cherche dans le Tempo I - Andante comodo une construction sensible...
Le dernier accord brutalement délivré, Haenchen doit se tenir à la barre du pupitre pour reprendre son souffle, avant de montrer à son premier violon d’un signe de la tête qu’il va tenir et achever l’ouvrage. L’Adagio débute donc lui aussi très lentement, mais ne dégage pas particulièrement d’émotion, malgré un très beau basson solo. Le concert s’achève après quatre-vingt quinze minutes de musique et laisse une sensation d’inachevé, à l’image de la vie, avec de bons et de moins bons moments, et rarement... quelques instants exceptionnels.
Vincent GUILLEMIN

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www.on-mag.fr, 05. April 2018
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"Ce soir du 29 mars 2018 c’était au chef allemand Hartmut Haenchen de diriger cet impressionnant et ultime chef- d’œuvre de Gustav Mahler. Le chef allemand à la tête d’un Orchestre Philharmonique de Radio France impeccable, maîtrisait aisément le dantesque et terrifiant premier mouvement ainsi que l’Adagio final, lui insufflant une réelle émotion, alors que les deux mouvements centraux affichaient parfois une retenue alourdissant leur exécution."
Michel Jakubowicz
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http://classictoulouse.com, 01. April 2018
... L’alternance entre les épisodes tendres, mélodieux et les plages sombres et tragiques, comme dans une lutte entre la vie et la mort, est néanmoins bien réalisée par un déploiement somptueux des couleurs orchestrales.
Les deux mouvements centraux sonnent comme un retour sur Terre. Dans le deuxième volet Im Tempo eines gemächlichen Ländlers ..., la succession des trois danses champêtres mêle le savant et le populaire d’une manière caractéristique du langage mahlérien. L’agitation désordonnée, les motifs tranchants, agressifs, mouvementés du Rondo - Burleske qui suit s’opposent également, comme pour étourdir l’auditeur, aux réflexions profondes que sous-tendent les mouvements extrêmes. Pour ces deux volets animés, le chef choisit également une certaine modération des tempi, comme pour atténuer la vivacité des contrastes que certains interprètes accentuent. La soudaine apparition du thème qui constituera la substance apaisée du final sonne ici comme un avertissement, comme une prophétie, avant la conclusion abrupte de cette section.
Lorsque s’élève enfin, douloureusement, la longue mélodie apaisée qui ouvre le sublime final Adagio, une sorte de miracle s’accomplit, le ciel s’ouvre à nous. Phrasé avec une émouvante délicatesse par les cordes consolatrices, ce motif donne l’impression de ne pas avoir de fin. Quelques agitations viennent interrompre provisoirement cette méditation qui coule comme un fleuve tranquille. Néanmoins, la conclusion est apaisée, sans révolte. La mort est acceptée comme un repos. La symphonie s’achève sur un quadruple pianissimo. Le son s’évanouit dans le néant sur un accord « flottant », comme inachevé. On ne perçoit pas la fin, comme pour exprimer cette sensation d’éternité. Un long silence prolonge cet accord, serre les gorges, avant que les applaudissements ne se manifestent enfin, au début comme à regret, puis éclatent en ovations. Tout le déroulement de ce final atteint véritablement l’indicible.
Bravo à tous!
Serge Chauzy

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www.concertonet.com, 29. März 2018
Le Mahler douloureux de Hartmut Haenchen

Rien de plus passionnant que d’entendre, un mois après Daniel Harding, Hartmut Haenchen dans la Neuvième Symphonie de Mahler – il remplace Myung-Whun Chung. Tous les deux partagent le goût de la transparence polyphonique et le refus de l’épaisseur. Mais l’Allemand va sans doute plus loin, avec une conduite encore plus unitaire du discours. Si son Andante comodo annonce Schoenberg, ce pourrait être déjà celui des Variations opus 31. Et l’on y perçoit une émotion que l’Anglais ne libérait que pour un lumineux Adagio final. Chez Haenchen, le premier mouvement baigne déjà dans une atmosphère de noirceur désespérée : direction plus visionnaire, plus mahlérienne – du moins si l’on associe Mahler, surtout celui-là, à un certain expressionnisme. Le Ländler trahit déjà, au-delà du trois temps faussement bonhomme de la danse paysanne, une ironie qui deviendra grinçante dans le Rondo-Burleske, remarquablement construit, dont la direction met les arêtes à vif – ces mouvements centraux constituaient le point faible de Harding, sans doute parce qu’il lorgnait plutôt vers la musique pure. Il jetait une clarté apollinienne sur l’Adagio, Haenchen y privilégie le clair-obscur, comme si la douleur restait latente, ce qui le rend plus poignant encore. La différence entre les deux approches tient finalement à leur rapport à une tradition dont Haenchen se veut l’héritier – il a consulté la partition annotée de Willem Mengelberg. L’orchestre, magnifique, sonne plus allemand ici que l’Orchestre de Paris, auquel il n’a rien à envier – le premier violon est d’ailleurs ce soir Kai Vogler, Konzertmeister de la Staatskapelle de Dresde. L’homogénéité des cordes, la rondeur des vents, avec des solistes qui se surpassent, sont celles des très grands soirs.

Didier van Moere

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